Homélie du dimanche 9 juin 2024, 10e dimanche du Temps ordinaire, année B.
Messe célébrée par le Père Patrick Gaso, à Aix-les-Bains – Saint Simond.
Évangile selon saint Marc 3, 20-35. Livre de la Genèse 3, 9-15. Psaume 129.
Lettre de saint Paul aux Corinthiens 4,13 à 5,1.
Pour certains textes des dimanches, l’homélie est simple, facile et même presque fluide ! Mais pour le pauvre prêtre que je suis, les lectures de ce jour ne sont pas simples à expliquer, surtout en dix minutes ! Ils sont denses. Permettez-moi cette invitation : prenons le temps de lire la Parole de Dieu avant de venir à la messe, cela nous permettra de mieux comprendre les enjeux et d’être plus attentifs à l’homélie.
Pourquoi cette invitation ? Les textes que nous venons d’entendre sont un peu difficiles, car ils mettent devant nos yeux une réalité assez dure, une réalité constante dans la Parole de Dieu et dans l’enseignement de Jésus.
Cette réalité est celle du combat et de l’existence du Mal, de la lutte contre les forces de Satan à l’œuvre dans le monde et dans nos vies.
Voilà, chers amis, le fil conducteur que nous sommes invités à suivre ensemble, maintenant !
Il y aura deux points et une petite conclusion.
Premier point : le combat des Origines !
Le livre de la Genèse que nous avons entendu en première lecture nous présente, dans les choix d’Adam et Ève aux sollicitations du Serpent, (ils croquent le fruit qui semblait savoureux) une forme de réponse à la question existentielle : « d’où vient le Mal ? Pourquoi existe-t-il dans notre monde ? »
Cette énigme touche tout le monde et toutes les générations qui se posent ces questions ! Pourquoi le mal ? Pourquoi l’homme devient-il un loup pour l’homme, pour son frère ou sa sœur ? Pourquoi tant de violence ?
Cette question est centrale, mais je ne pourrais pas ici y répondre par un long exposé. Pourtant, il y a une certitude que révèle la Bible : comprendre que le mal qui est en nous ne vient pas de Dieu ! Nous pouvons poser cet acte de foi !
Tel que le présentent les textes Sacrés, le Mal est entré en notre humanité par un choix libre d’Adam et Eve.
La conséquence de ce choix est qu’il obscurcit la beauté de la nature créée par Dieu, mais surtout qu’il a rompu le lien privilégié que l’Homme avait avec Dieu !
La faute (ils ont, certes, désobéi) n’est pas tant d’avoir mangé le fruit, mais c’est la défiance d’Adam qui se cache de Dieu. Il se défie de Dieu et se retire de sa présence : « J’ai entendu ta voix dans le jardin, j’ai pris peur… et je me suis caché… »
Cette distance, ce manque de confiance, cette dissimulation dont l’homme seul est à l’origine, ont mis une ombre réelle, une rupture entre tous les hommes et Dieu ! Quelque chose s’est alors, brisé ! L’homme a manqué à sa parole. S’il y a une malédiction, elle est contre le serpent, le Tentateur, Satan ! Mais Dieu prend acte de la liberté d’Adam et Eve. Dieu, aussi puissant soit-il, ne peut commander l’amour ! Il n’y a pas de condamnation, mais il y a bien une conséquence !
La conséquence est que ce péché, cette défiance d’Adam et Ève, entraîne un changement qui est comme une peine qu’ils doivent porter et que, nous dit notre foi, ils transmettent à leurs descendants et descendantes, de génération en génération. Pour autant, l’amour de Dieu pour sa création a-t-il diminué ? Face à cette situation de rupture, Dieu va essayer de retrouver cette proximité… par plusieurs moyens, Il va tenter de retrouver ce contact, car Dieu nous aime et ceci par plusieurs moyens : ce seront avec Moïse, les Prophètes, en dernier lieu : son fils Jésus qu’Il va nous envoyer ! Mais, l’homme, la plupart du temps, reste sourd à cette main tendue du Créateur, il garde la tête dure et la nuque raide !
Il est important de comprendre cela pour que nous puissions entrer dans cette générosité, dans cet amour que Dieu a pour chacun de nous.
Saint Paul dira aux Romains : « En effet, de même que par la désobéissance d’un seul être humain, la multitude a été rendue pécheresse, de même par l’obéissance d’un seul la multitude sera-t-elle rendue juste ». (Romains 5, 19) Il y a comme une analogie entre la rupture d’Adam et la réconciliation que Jésus vient apporter. Le mal est entré dans le monde par un seul (Adam) et il est vaincu par un seul, le Christ.
Le rôle de Sauveur de Jésus, sa Mission ne se comprend que si on porte notre regard sur cette réalité du Mal, de son origine, de sa conséquence et surtout du projet de vie, de cet amour inconditionnel que Dieu a pour chacun de nous et que Dieu ne cesse de désirer pour l’Homme. Est-ce sans espoir ? NON !
À quels moments, frères et sœurs, le contact qui a été rompu entre Dieu et les Hommes sera de nouveau possible ? C’est au moment du baptême de Jésus où Jésus accepte librement, lui qui est sans péché, de recevoir ce baptême de conversion par Jean le Baptiste ! Il le fait par obéissance, par solidarité avec notre humanité.
Que se passe-t-il ? Au moment où Il est plongé dans l’eau et en ressort, la colombe – l’Esprit Saint- va descendre, les Cieux qui étaient fermés, s’ouvrent enfin, et cette voix de Dieu que l’on entend : « Tu es mon Fils bien aimé – Écoutez-le » !
Notons l’importance de ce message ! Notre mission de Chrétiens est bien d’écouter le Christ et d’annoncer son plan de salut, son plan de sauvetage pour les hommes et les femmes, et redire cette union de vie avec notre Dieu !
Deuxième point : je termine rapidement avec l’évangile !
Est-ce fini pour autant ! Tous se sont-ils convertis ? Tous écoutent-ils Jésus ? Non ! Pourquoi ? Les forces du Mal sont toujours à l’œuvre ! L’Homme est inconstant et changeant ! Mystérieusement, face à la liberté de l’homme, à ses passions parfois terribles, à sa folie, Dieu est impuissant et ne peut rien faire ! .
Dans l’évangile de ce jour, la discussion que Jésus a avec les pharisiens, nous permet de faire un pas de plus et manifeste que le mal n’est pas seulement en nous par nos choix, il est aussi l’œuvre du Malin, de Satan, de Belzébul.
Le Mal a aussi une origine extérieure à nous. Il se propage par toutes sortes d’artifices. Satan met à l’œuvre des forces mystérieuses et l’homme est capable librement de dire « OUI ». « OUI » à Satan, au Diviseur et donc « NON » à Dieu ! L’intelligence est comme altérée, biaisée, il tombe- hélas – volontairement, dans le piège ! Nous pouvons trouver là, par conséquent, le sens du blasphème contre l’Esprit Saint : ce « NON » libre et radical à Dieu.
Cela peut être insidieux, discret apparemment, apparemment sans incidence : en fait, l’homme, comme Adam, continue à se cacher de Dieu ! Nous rejetons ce lien privilégié que Dieu souhaite avec nous.
La détermination de Jésus est un exemple ! Lui, le nouvel Adam, il avance librement, sans se cacher ! Jésus ne se contente pas de dénoncer le mal, par obéissance et par Amour, fort de la communion avec son Père, Il est vainqueur de Satan et s vainqueur de la mort.
Conclusion :
En terminant cette réflexion, retenons que le mal ne vient pas de Dieu. Les forces du mal se concrétisent dans l’action du Malin et de ses sbires, elles sont réellement à l’œuvre ! Mais elles restent sans effet si l’homme, avec discernement, dans la prière et avec réflexion, ne tombe pas dans le panneau du Démon.
Le parcours du Mal se dessine dans la vie du monde et dans nos vies personnelles. Ne nous croyons pas à l’abri de ses attaques. Il est toujours là comme tapi derrière la porte, prêt à se manifester.
C’est ce que nous disons dans la prière du Notre Père, lorsque nous demandons à Dieu « Ne nous laisse pas entrer en tentation ». Nous restons toujours dans ce risque !
Frères et sœurs, demandons, par la force de l’Esprit Saint, ce nécessaire discernement qui nous permet de reconnaître le mal lorsqu’il se pointe, de le rejeter, de faire le choix de Dieu et de demander la vie, la vie éternelle.
Ainsi soit-il !