ÉVANGILE « Jésus jeûne quarante jours, puis est tenté » (Mt 4, 1-11)
En ce temps-là, Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le diable. Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim. Le tentateur s’approcha et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. » Mais Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. » Alors le diable l’emmène à la Ville sainte, le place au sommet du Temple et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et :Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. » Jésus lui déclara : « Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. » Le diable l’emmène encore sur une très haute montagne et lui montre tous les royaumes du monde et leur gloire. Il lui dit : « Tout cela, je te le donnerai, si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi. » Alors, Jésus lui dit : « Arrière, Satan ! car il est écrit : C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, à lui seul tu rendras un culte. » Alors le diable le quitte. Et voici que des anges s’approchèrent, et ils le servaient.
HOMELIE
Depuis mercredi nous voici donc dans le temps du carême, un temps qu’on a fait tout triste, tout poussiéreux, alors que dans l’évangile des cendres Jésus nous invite à la joie, lave toi, parfume toi la tête.
« Pas de carême sans Pâques », écrit le pape François. En effet le carême n’a de sens que s’il est une marche vers Pâques. C’est particulièrement vrai pour les catéchumènes en route vers le baptême qui aujourd’hui reçoivent l’appel décisive de la part de l’évêque. Ils sont 17 en Savoie dont un à Aix les Bains et 4.503 pour la France. C’est pour eux que le carême est bâti comme une catéchèse rappelant les grandes étapes de l’alliance depuis la création, la première lecture d’aujourd’hui, puis l’histoire d’Abraham, de Moïse, de David et des prophètes, un survol de l’ancien testament qui jalonnera les dimanches de ce carême. Si le carême est une catéchèse catéchuménale, un temps fort dans la préparation des baptisés de Pâques, c’est aussi une bonne occasion pour les vieux baptisés que sommes pour raviver la grâce de notre baptême, pour secouer la poussière des habitudes et de la routine symbolisée par les cendres reçues mercredi dernier avec l’appel pressant de la part de notre Dieu : « Convertissez-vous et croyez à l’évangile ». Nous convertir c’est nous tourner vers Dieu, « renouveler notre rencontre personnelle avec Jésus-Christ ou au moins prendre la décision de nous laisser rencontrer par lui…Dieu ne se fatigue jamais de pardonner, c’est nous qui nous fatiguons de demander sa miséricorde.» 4.
Dans l’évangile de saint Matthieu, Jésus commence sa vie publique par un temps de formation au désert. Pour la communauté juive à laquelle s’adresse cet évangile c’est bien sûr une référence aux 40 ans de l’exode. 40 ans de difficultés et de tentations certes, mais surtout 40 ans de proximité avec Dieu, 40 ans de formation pour perdre la mentalité servile de citoyens de seconde zone en Egypte, pour apprendre à devenir des partenaires de l’alliance, des fils et des filles de Dieu. Aussi dans la bible, dans la mémoire du peuple, le désert c’est l’heureux temps des fiançailles, la lune de miel avec Dieu. Et aux périodes sombres de son histoire le peuple rêve de ce temps du désert où il pourrait tout recommencer. « Je vais la séduire, dit le prophète Osée en parlant de sa femme infidèle, image du peuple qui va vers d’autres dieux, je vais la séduire, la conduire au désert et parler à son cœur. » . Eh bien nos 40 jours de carême n’ont pas d’autre but que nous rapprocher de Dieu, nous reconnaître comme ses enfants bien aimés et donc nous reconnaître comme frère et sœur…… Pendant ses 40 jours de formation à sa vie publique, 40 jours nous dit le talmud c’est le temps de formation d’un rabbin, Jésus affronte le tentateur, le diable, c’est-à-dire le diviseur, celui qui depuis la première page de la bible vient semer le doute, la suspicion, entre Dieu et l’homme d’abord puis entre l’homme et la femme qui deviennent esclaves du tentateur ; ils se découvrent nus, c’est la condition de l’esclave. Les tentations que l’évangile nous rapporte résument les tentations que Jésus affrontera toute sa vie. « Ordonne que ces pierres deviennent du pain » tentation de la domination qu’on retrouvera après la multiplication des pains lorsque la foule veut en faire son roi. ….
« Si tu es le fils de Dieu, jette toi en bas » fais un coup d’éclat, épate les foules. Donne –nous un signe, tentation qui le poursuivra toute sa vie, jusque sur la croix : « Si tu es le fils de Dieu, sauve-toi et nous avec » – ….« Tous les royaumes du monde et leur gloire, je te les donnerai » La tentation du pouvoir, « Est-ce maintenant que tu vas restaurer ta royauté ? » « Prends nous l’un à ta droite, l’autre à ta gauche » demanderont les fils de Zébédée……Au désert, au début de sa vie publique, Jésus choisit une fois pour toute la fidélité, il choisit de se conduire en fils qui se sait aimé. Ce sont les mêmes tentations que nous avons à affronter tout au long de nos vies, le tentateur n’a pas changé de tactique : affranchis- toi de la tutelle de Dieu, sois ton propre Dieu. On en revient à la tentation des origines. Et le péché c’est toujours plein d’attraits, c’est agréable sinon ça ne nous tenterait pas…. Eh bien pendant ces 40 jours de carême apprenons avec le Christ à nous comporter comme des fils et des filles pleins de confiance, comme des partenaires de l’alliance, non plus comme des serviteurs ou des esclaves :faisons le choix de la conversion.